De quoi traite concrètement votre livre, Madame Delmotte ?
Mon livre aborde la vie avec la maladie, le manque de traitement et l’importance pour les patients de se sentir mieux considérés. Les témoignages recueillis appellent aussi à l’avènement d’une société plus inclusive. Nous n’avons pas encore suffisamment conscience de ce que représente un handicap invisible, et la maladie de Charcot-Marie-Tooth peut en être un. Le livre présente plusieurs témoignages de personnes touchées, ainsi que ceux de dix personnalités, comme Bernard de La Villardière ou encore Aurélien Rousseau.
Qu’est-ce que précisément la maladie de Charcot-Marie-Tooth ? Quelles sont ses manifestations concrètes ?
La maladie de Charcot-Marie-Tooth est la maladie neuromusculaire héréditaire la plus fréquente. 1 personne sur 2 500 soit environ 30 000 personnes en France en sont atteintes, sans distinction de sexe ni d’âge.
Il s’agit d’une maladie génétique, évolutive, qui atteint les nerfs périphériques provoquant essentiellement une amyotrophie des mollets, des avant-bras et des mains.
Bien que la CMT n’affecte pas l’espérance de vie, le niveau de handicap est très variable et peut aller d’une légère difficulté à la marche jusqu’à la nécessité d’une canne ou d’un fauteuil roulant.
Un témoignage vous a-t-il touché en particulier ?
Oui, celui du petit Léo qui fait face à des difficultés très concrètes, en termes de mobilité ou de scolarisation. Il y a aussi celui d’une jeune femme, qui a témoigné anonymement car elle n’ose pas parler de sa maladie à son employeur de peur d’être dévalorisée ou perçue négativement. La CMT entraîne aussi une grande fatigue, qui n’est pas toujours comprise par l’entourage. Ce sont des situations très complexes à vivre, car la honte empêche souvent les personnes touchées d’évoquer leur situation, par peur du déclassement économique et social.
Selon vous la maladie de Charcot-Marie-Tooth est-elle bien prise en charge par le système de santé Français ?
Non, car elle reste insuffisamment diagnostiquée. Pour prendre mon exemple, je tombais sans arrêt mais personne n’a cherché à savoir pourquoi. Lorsque j’ai été plâtrée, je n’arrivais pas à me servir de béquilles mais personne ne s’est posé la question du manque de force dans les bras… À part la kinésithérapie et les chaussures orthopédiques, il n’existe pas de traitement pour cette maladie.
Ce qui est aussi interpellant, c’est qu’on encourage désormais les personnes atteintes à pratiquer une activité physique, alors que celle-ci a été pendant longtemps déconseillée. Il faut à tout prix encourager la recherche pour mieux comprendre la maladie.
Selon vous, quel rôle peut jouer le secteur de l’ESS ?
À l’instar du FHS, qui aide de nombreuses associations à développer de très beaux projets, les mutuelles pourraient renforcer leur action pour réduire le reste à charge des patients, en matière de podologie et de pédicurie par exemple. Elles pourraient aussi élargir leur communication pour sensibiliser davantage au handicap, et faire en sorte que ce dernier soit perçu comme une force qui permet de développer d’autres capacités. Le secteur de l’ESS a un rôle crucial à jouer pour valoriser ces compétences.
Pourquoi ce livre ?
Je suis directement concernée par la maladie, et en tant que journaliste spécialisée dans les secteurs de la santé et de l’action sociale, j’ai ressenti le besoin d’apporter ma contribution. Beaucoup de personnes atteintes par cette maladie se retrouvent isolées. Il est parfois difficile de parler de son handicap alors que le partage d’informations et de soutien – je pense à tout ce que peut apporter l’association CMT-France – est essentiel.
Lien vers le livre d’Hélène Delmotte